28 février 2007


Pas eu le temps d’écrire même si l’envie me brûle. Il faut encore que je t’apprivoise, que je trouve mon rythme et les mots. Une page grise n’est pas une page jaune.

J’avais envie de te raconter Lyon quand j’y étais, la semaine dernière. J’étais assis devant la fontaine, près du manège. Pile au soleil. Je voulais te dire, puis la ville m’a repris d’un coup et j’ai laissé cela à plus tard.

Lyon est belle. Elle est belle parce qu’elle est féminine, ça ne fait aucun doute. Elle s’étend entre deux longs cours d’eau très différents, deux longues jambes élégantes. Les bords du Rhône me font un peu penser à Paris et ses immeubles haussmaniens prestigieux. Mais ici, les façades prennent une coloration douce et légèrement jaune au coucher du soleil. Le Rhône n’a rien à voir avec la Seine qui semble plutôt tranquille au moment où elle aborde Paris. Il est large et on sent dans ses eaux une force énorme et sauvage, un truc qui grouille sourdement. Les bords de Saône me retiennent plus. J’ai l’impression d’être dans le nord de l’Italie. Les maisons ont des visages plus lisses et sont maquillées de couleurs terre et ocre, de sienne ou de jaune profond. Pour relier la presqu’île au quartier Saint-Jean, de gigantesques passerelles suspendues qui bougent légèrement sous l’effet du vent donnent à votre marche quelque chose de bizarre, un côté pas trop assuré. Et puis deux collines en guise de poitrine : Fourvières où je suis surpris par l'écho de la sonnerie du gsm dans la partie basse de la basilique où je me promène seul avec Rudy; et la Croix-Rousse où je m'aventure à vélo. C'est ce quartier qui m'attire le plus, mais il faut vivre Lyon plus longtemps pour le découvrir, connaître les gens.

Piaf au cinéma. Je suis aimanté par le personnage.

Rudy est pareil à lui-même. Je suis chez lui de deux minutes et je me sens bien. Il est un ami précieux. Je lui écris parce que ma pudeur m'empêche de lui dire. Un de ces amis avec lesquels il n'est pas besoin de parler pour communiquer. Il m'offre ses clés. Je crois que c'est un des plus beaux cadeaux qu'on puisse faire à un ami. Je bredouille des "mercis" que je voudrais à la hauteur du geste.

Et puis Rudy me présente ceux qui font un peu de sa vie là-bas. Une Caroline de Perpignan à l'accent méridional qui nous accueille chez elle avec tant de gentillesse, un Lou que je trouve abominable avec ses certitudes sur lui-même et les autres et sa façon de regarder les hommes sur son écran d'ordinateur comme du bétail dans la file d'attente de son abattoir à lui. Je me dis que ça cache un vide énorme, un manque de confiance. Mais quand le manque de confiance se traduit par le dénigrement et le piétinement des autres pour se sauver soi, y a quelque chose qui cloche. D'entrée de jeu il m'insupporte et le lui fais comprendre.

Et puis il y a Boris. Un jeune garçon d'une beauté foudroyante. Trop foudroyante sans doute pour m'attirer un tant soit peu. Je ne parle pas que de la beauté qui se voit, celle du visage ou des mains, du nez et de la bouche. J'ai l'impression que Boris est beau tout entier. Dedans et dehors. Il est de ces personnes qui, quand vous leur parlez, sont pleinement avec vous et vous regardent vraiment. Boris croit en l'amour, l'amour pur, pas l'amour de pacotille qui inonde le net, les rues et les images, partout. Ses mots sont naïfs, simples et vrais. Je parle musique, littérature. Je le vois déballer un cadeau. Je suis désarmé devant sa réaction, sa faculté à s'émouvoir, à s'étonner, à s'émerveiller, presque, des choses les plus simples. Je voudrais être capable de mériter un peu de son amitié. Ca voudrait dire que je suis un type bien.

Et à mon retour il était là, pas Boris, mon amoureux, celui qui me fait vibrer, qui me fait bander, qui me fait rire et pleurer, celui qui m'injecte du bonheur très loin dans les veines. Il était là, juste à la sortie du train à grande vitesse. Je l’ai serré en passant mes mains dans ses boucles et je me suis senti en paix, rempli d’une sérénité que lui seul arrive à m’apporter. Avec lui, mes doutes partent en fumée.

Dans notre maison perchée m’attendaient, au milieu du grand moleskine, les plus beaux mots d’amoureux de l’univers, des mots qui balaient tout d’un seul accent.

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